Bruxelles ou le renouveau d’une écologie pragmatique




Alors que certains pays européens s’écharpent sur les thématiques de transition énergétique, pris en étau entre impératifs du réchauffement climatique et dangers des chaufferies nucléaires, la Belgique n’est pas le pays du charbon et des terrils que certains s’obstinent à voir. Avec réalisme et volontarisme, la Belgique, et sa capitale Bruxelles, ont pris le chemin de cette transition sans tapage médiatique mais avec une certaine efficacité.



Capitale d’une écologie globale ?

Crédit : JDE / Ingimage
Si la Belgique n’est pas encore un pays tropical, cela ne nous empêche pas de ressentir déjà les effets du réchauffement climatique. Selon l’Institut Royale de Météorologie, « Les 17 années les plus chaudes depuis 1833 ont toutes été observées au cours de la période 1989-2011. Dix d’entre elles concernent… les onze dernières années ! (de 2002 jusqu’à 2012 inclus) ! », pour des mesures prises en région bruxelloise, à Saint-Josse-ten-Noode et surtout à Uccle. Une telle série statistique ne doit pas grand-chose au hasard, d’autant que le phénomène est général. Le problème est que ce phénomène a des conséquences fâcheuses : « 25 à 75 % des espèces présentes dans notre pays courent le risque de voir leurs populations se réduire de manière plus ou moins importante », selon l’Institut flamand pour la recherche de la nature et de la forêt. Or cela a des impacts directs sur l’agriculture et donc sur les approvisionnements en denrées alimentaires et l’alimentation, besoins primaires des habitants. C’est l’une des raisons pour lesquelles la Belgique a lancé depuis 2010 un programme de Transition vers un système alimentaire durable (SAD) à Bruxelles, qui conjugue agriculture raisonnée, recyclage, lutte contre le gaspillage et commercialisation écologique de ces denrées.
 
Une vision systémique de l’écologie dont se félicite Patrick Couzinet, directeur commercial de Veolia Water Technologies : « en Belgique, c’est avec un pragmatisme débarrassé de toute considération idéologique que les autorités structurent leur politique de développement durable. Ainsi, poursuit Patrick Couzinet, l’écologie n’y est pas malmenée par l’alternance politique : elle fait l’objet d’un large consensus qui alimente une vision stratégique globale et de long terme, depuis la gestion des déchets jusqu’au traitement de l’eau, en passant par les sources d’approvisionnement en énergie. » Ces dernières constituent d’ailleurs un chantier majeur de l’écologie belge depuis quelques années. En témoigne l’exemple de cette entreprise bruxelloise installée sur le quai à la Chaux, au cœur de la capitale : spécialisée dans le conseil aux grands projets de parcs éolien ou solaires à l’international, la société 3E développe des projets de recherche dans lesquels la Région bruxelloise vient d’investir 2 M€.
 
Le Port de Bruxelles, lui-même, s’est récemment doté d’une surface de 13800 m² de panneaux photovoltaïques générant l’équivalent  de la consommation annuelle moyenne de 360 ménages. Son Président, Benoît Hellings, explique : « Le port est fier de jouer ce rôle de pionnier dans le secteur photovoltaïque. (…) Comme entreprise publique régionale, le Port donne aussi l’exemple : il démontre à tous les acteurs privés et publics régionaux possédant le même type de toiture que c’est possible et que c’est rentable ». Dont acte !

La Belgique, pays de l’énergie solaire et de l’habitat passif !

La plus grande installation photovoltaïque installée dans la région Bruxelloise compte 25 000 m2 de panneaux solaires. Symbole d’une tendance forte, la région Bruxelloise ne fait pas pour autant figure d’exception en Belgique. « La production électrique annuelle estimée équivaut à 16% de la consommation des logements belges (3.500 kWh/an) ou 3,1% de la consommation électrique totale (82 TWh en 2013 selon Synergrid). La puissance installée par habitant de la Belgique (268 Wc/hab) se situe toujours au 3ème rang mondial, derrière l’Allemagne (442) et l’Italie (290) », annonce ainsi L’Association pour la Promotion des Energies Renouvelables (APERe) début 2014. Un logement belge sur treize est ainsi alimenté par de l’énergie photovoltaïque, ce qui en proportion classe la Belgique au premier rang mondial, en termes d’équipements des ménages.
 
L’habitat sera en effet le prochain grand chantier de la Belgique, pour raccorder les logements aux réseaux d’énergies renouvelables, mais aussi plus largement pour les intégrer dans une logique globale de développement durable, au-delà de la seule question de l’isolation ou des espaces verts.
 
Parmi les nombreux projets en cours, citons par exemple la construction passive, futur standard de tous les bâtiments bruxellois à compter du 1er janvier. « Le secret de cette simplicité et de cette intelligence bruxelloise résulte de la confiance dans les talents et d'un usage pragmatique de l'économie de marché au service de l'intérêt général. Bruxelles-Métropole montre, s'il était nécessaire, que la résolution de la problématique environnementale est à la fois marrante et économiquement vertueuse », explique le magazine Développement Durable au sujet notamment des projets de Sébastian Moreno-Vacca, architecte, président de la Plate-forme Maison Passive belge, et enseignant à l'Université libre de Bruxelles. Reconstruction, recyclage, isolation, et recours aux énergies renouvelables, tout est bon à prendre pour obtenir des bâtiments auto-suffisants en énergie de chauffage et en électricité.
 
Benoit Derenne, président de la Fondation pour les Générations Futures, résume bien l’ambition : « faire de toute une région – la Région de Bruxelles-Capitale -, une région « en développement durable » », tout simplement. Sauf que cela n’a rien de simple et que de nombreux efforts devront encore être consentis pour parvenir à un résultat acceptable par les citoyens, mais aussi et surtout par l’environnement lui-même.


24 Octobre 2014