Forsee Power mène sa barque dans le maritime




Si l’électrification des transports urbains monopolise souvent les discours, de nombreux progrès sont aussi en marche du côté de la navigation durable. Forsee Power, intégrateur francilien de systèmes de batteries, fait partie de ceux misent aussi sur la propulsion verte pour le grand bleu.



Electrifier les transports, tous les transports... Tel est l’idéal vers lequel tendent les acteurs de l’énergie et des transports aujourd’hui. En France comme ailleurs, préoccupations écologiques et volontarisme politique incitent à repenser les modes de déplacement humain. Dans cette volonté d’allier l’écologique à l’économique, le tout électrique apparait comme une solution propice sur terre, comme sur mer. Dans la mobilité durable, « il n’y a pas que les voitures électriques […] le secteur des bateaux, gros ou petits, et la marine sont également des créneaux porteurs », explique ainsi dans une interview (1) Gilles Ramzeyer, directeur de la division stockage d’énergie pour Forsee Power. Il ajoute : « cette forte demande globale va favoriser l’essor des batteries électriques et les innovations sur les solutions de stockage d’énergie au Lithium. Sur le plan de l’autonomie, de nombreuses technologies différentes sont à l’œuvre, avec chacune leurs avantages et leurs inconvénients. » En effet, différentes technologies répondent aujourd’hui à différents besoins. Et les bateaux empruntent pour l’instant la même voie technologique que les voitures, notamment sur la question du passage par la case « moteurs hybrides ».

Propulsion hybride d’abord ?

Un bateau, ce n’est pas tout à fait comme une voiture. Au-delà de cette lapalissade, un constat s’impose : l’étendue des volumes et des poids à déplacer est considérable, de quelques centaines  de kilos à plusieurs centaines de milliers de tonnes. Mais Forsee Power, dans une chronique publiée sur le JDE (2), l’admet volontiers : si « se faire se mouvoir un pétrolier ou un porte-conteneur géant grâce à la seule l’énergie électrique peut pour l’instant faire sourire », cela reste néanmoins l’objectif des industriels du secteur. Et les bateaux présentent tout de même un avantage « de taille » par rapport aux véhicules terrestres : « la plupart des bateaux disposent d’un espace suffisant pour l’installation de systèmes nombreux », poursuit Forsee Power dans la même chronique. Le poids des batteries, qui peut être important, ne représentent pas non plus les mêmes difficultés dans le secteur maritime : certains voiliers sont par exemple équipés de lest de quille de plusieurs centaines de kilos voire de plusieurs tonnes pour les plus gros. Ce qui n’est pour l’instant qu’une masse inerte en bout de quille pourrait tout à fait un jour accueillir des systèmes de batteries, et ainsi optimiser poids et encombrement des voiliers de compétition.

Pour l’instant, à défaut de propulsion 100% électrique sur les plus gros navires, reste la solution de la propulsion hybride : coupler un moteur thermique traditionnel avec un moteur/générateur électrique, et un système de batteries (en plus d’une électronique de gestion). « Le propriétaire d’un bateau qui souhaite investir dans la propulsion électrique devra, étant donné le coût et la capacité actuelle des accumulateurs, sérieusement considérer la propulsion hybride », peut-on lire dans la revue l’Escale Nautique (3). C’est pour développer une telle solution que Forsee Power s’est associée à la société HyPS (Hybrid Propulsion Systems) pour équiper les nouveaux super-yachts (J-class) du chantier néerlandais Holland Jachtbouw (HJB). Le but d’un tel système est de permettre une navigation et des manœuvres portuaires sur batteries. Les batteries fournissent également l’énergie à bord au mouillage sans qu’il soit nécessaire de faire tourner constamment les moteurs (4). D’un point de vue économie et confort, la propulsion hybride permet de diminuer la consommation de carburant tout en réduisant bruit et vibrations. Mais l’hybride, c’est encore un système à moitié thermique.

Le 100% électrique pour bientôt ?

Certains types de bateaux 100% électriques existent déjà : petits bateaux de plaisance, jet-skis électriques, navire fluviaux, bateaux de servitudes portuaires… La liste est déjà longue ; les ports s’équipent d’ores et déjà de bateaux tout électriques comme les bateaux navettes « Navibus » ou le « Transrade ». Le choix de l’électrique pour l’industrie nautique commence à s’imposer, mais au sein d’un cadre pour l’instant restreint : des trajets courts et déterminés, ou des circuits permettant de disposer de bornes de recharges nombreuses. « En navigation fluviale, on peut facilement imaginer des stations de recharges à intervalles réguliers », indique Forsee Power dans sa chronique.

La propulsion électrique des petits bateaux est donc devenue une réalité aujourd’hui, notamment parce qu’elle permet, à un coût abordable à cette échelle, de réaliser d’importantes économies sur le poste carburant. Cependant, la motorisation 100% électrique pour les gros bâtiments sera-t-elle un jour possible ? « Tant que les accumulateurs n’auront pas un meilleur ratio poids/puissance emmagasinée et un meilleur prix par kW de réserve, les solutions hybrides demeureront les seules options possibles pour celui qui souhaite pouvoir en tout temps bénéficier d’une grande d’autonomie. » La revue L’Escale Nautique résume là le défi sur le quel planche actuellement l’ensemble des industriels de la filière, dont Forsee Power : « L’enjeu est le même pour tous : autonomie et, dans l’idéal et l’avenir, autosuffisance ». Un cap technologique reste à franchir. Les problématiques d’encombrement et d’autonomie pour des bateaux effectuant de longs trajets restent encore un challenge pour l’industrie énergétique.

Dès 2007, le Sun 21 réussissait pourtant la première traversée de l’océan Atlantique à l’énergie solaire, mais ce « catamaran solaire » restait un démonstrateur technologique, dont la vitesse moyenne de traversée n’a pas dépassé 4 nœuds. Peu importe au final, la possibilité existe donc, ne reste plus qu’à améliorer la technique. Et les technologies progressent vite, il n’y a qu’à observer, à petites échelles, les progrès des batteries de smartphones en une décennie. Demeure la question du prix, mais là encore, Forsee Power peut se montrer optimiste : « le prix des batteries au lithium baisse mais pour devenir une solution accessible à tous, il faut que cette baisse s’accentue encore. Les leviers de cette baisse seront les économies d’échelle », précise Gille Ramzeyer. Or le processus d’économies d’échelle semble bien enclenché pour Forsee Power qui vient d’ouvrir une nouvelle usine à Moissy-Cramayel. « Notre carnet de commandes pour 2016 représente un quadruplement de notre chiffre d’affaires 2015, lequel sera, déjà, le double de celui de 2014 », indique ainsi Christophe Gurtner, PDG de Forsee Power (5).

Après les transports urbains, c’est donc au tour de l’industrie nautique de devenir un véritable terrain d’innovation, bien que les problématiques de stockage et de l’autonomie restent un challenge à part entière... Mais un challenge qui ne semble pas faire reculer les spécialistes du secteur, bien au contraire.

(1)http://www.carnetsdubusiness.com/Stockage-d-energie-cle-de-voute-des-economies-connectees_a1025.html
(2)http://www.journaldeleconomie.fr/De-l-eau-et-du-courant-le-futur-de-la-navigation-sera-electrique-_a2073.html (3)http://www.escalenautique.qc.ca/pdf/archives/propulsion%20%C3%83%C2%A9lectrique,%20hors-bord%20et%20hybride.pdf
(4)http://www.helicesnews.fr/layout/set/print/News/Equipement-Service/79450-Forsee-Power-Forsee-Power-s-associe-a-HyPS-pour-fournir-des-systemes-de-batteries-haute-performance-a-l-industrie-nautique
(5)http://www.usinenouvelle.com/article/forsee-power-se-renforce-dans-la-production-de-batteries.N361328


1 Mars 2016