Logelis propose un système de construction « smart-tech ». Quel est ce procédé qui vient bousculer les technologies classiques de construction ?
Notre « produit » repose sur la conception, la fabrication et l’assemblage de panneaux composites entre lesquels est injectée une épaisseur de polyuréthane à haute densité. Très résistants, très durables, simples à produire et rapides à assembler, ces panneaux permettent surtout une isolation deux fois supérieure à la moyenne des constructions actuelles. Mais l’essentiel de notre valeur ajoutée réside dans l’intégration en amont à l’intérieur de ces panneaux de tous les composants d’une construction : systèmes électriques, la plomberie, ouvrants, chauffage… Toute la partie dite complexe est réalisée en usine, éventuellement jusqu’aux finitions intérieures et extérieures.
En quoi cette technologie peut-elle faire bouger les lignes dans le domaine de la construction ?
Notre technologie repose sur 3 « piliers ». Le premier consiste à déspécialiser la construction, pour permettre à des personnes non ou peu qualifiées de participer à la construction de leur habitat. A la base de notre réflexion, se trouve ensuite la volonté de mettre sur le même plan coût d’achat et coût d’usage, avec un grand soin apporté à l’efficience énergétique de nos bâtiments : nos maisons sont passives nativement, grâce à une isolation hors normes, et seront autonomes énergétiquement sous peu. Enfin, la simplicité et la rapidité de construction nous permettent de proposer des constructions 30% moins chères, aux standards HQE. Cela permettra de démocratiser l’accès à des constructions HQE pour tous les types de populations.
Vous vous êtes inspiré de procédés utilisés à Dubaï mais revendiquez votre production 100% Made in France. Pourquoi faire ce pari ?
L’inspiration de ce projet est effectivement née de la découverte à Dubaï d’une maison de milliardaire, construite à base de panneaux composites pour des soucis d’efficience énergétique. Mais le procédé de fabrication était encore artisanal ; nous l’avons industrialisé. Pour parvenir à ce résultat, j’ai travaillé dans un premier temps avec des ingénieurs automobiles, puis ensuite avec des spécialistes de la construction. Il en résulte un mode de production simple, axé sur la fiabilité, qui peut facilement être dupliqué dans n’importe quelle zone du monde, pour être pris en charge rapidement et efficacement par les populations locales. Notre outil de production permet aussi une grande flexibilité pour d’adapter aux spécificités de construction locales. Notre première usine est en France, où nous continuons de produire pour la France et notamment pour les bailleurs sociaux. C’est aussi dans cette usine française que sont mises au point toutes nos innovations.
La production peut être exportée ?
L’idée est toujours d’ouvrir rapidement des centres de production au plus près des zones de construction. Nous créons à chaque fois une structure économique avec un partenaire local majoritaire : nous apportons les capacités de production et la R&D, et lui nous ouvre les marchés locaux. En Irak, nous avons immédiatement créé 50 emplois sur place avec une seule personne venant de France pour assurer la coordination de la production.
Concrètement comment se réalise le montage des maisons Logelis et dans quels délais ?
En France, le délai moyen entre la mise à disposition d’un terrain viabilisé et la remise des clés est d’environ trois mois, pour des programmes de maisons individuelles avec un étage. En Irak, pour un programme mixte de 70 habitations, comprenant maisons individuelles et habitats collectifs, cinq mois se sont écoulés entre le livraison du terrain et la livraison des constructions. Notre objectif est d’atteindre les 15 jours avec des produits standardisés et des maisons modulaires industrialisées. Adaptables à la demande, ces modules comprennent les murs et les sols (et bientôt les toits) ; ils sont fabriqués en usine puis assemblées sur le terrain préparé à cette fin. Cela permet de réaliser des chantiers de constructions très simples et très rapides, pouvant se résumer à un assemblage de « Lego », sans la nécessité d’intervention sur les chantiers de tous les corps de métier habituels.
Vous insistez sur « les très hautes performances énergétiques » de vos maisons. Que garantissez-vous sur ce terrain ?
La performance thermique de nos panneaux est supérieure aux objectifs de la RT 2012 et même à ceux de la RT 2020. Cette isolation sans commune mesure garantit à elle seule une consommation d’énergie extrêmement faible, qu’il s’agisse de chauffage ou de climatisation dans les pays chauds. Cette sobriété énergétique permet dans 95% des cas de rendre autonome énergétiquement nos maisons grâce à l’installation de sources d’énergies renouvelables (panneaux solaires par exemple) et de batteries de stockage d’énergie en nombre réduit.
Au-delà de la prouesse technologique, votre projet avait-il également pour vocation de proposer des solutions face à crise du logement (pénurie, coûts élevés, primo-accession difficile, …) ?
Notre projet porte par essence une vocation sociale : permettre à des populations de tous pays d’accéder à des habitats aux normes HQE, rapidement, simplement et à des prix très inférieurs à ceux de la construction traditionnelle. Notre technologie permet d’obtenir le meilleur compromis disponible sur le marché entre qualité, prix et rapidité de construction.
Vos solutions sont aussi destinées aux professionnels tels que les promoteurs et les bailleurs sociaux qui doivent relever le défi de la transition énergétique tout en maîtrisant leurs coûts. Ces derniers sont-ils sensibles à votre vision de l’habitat ?
Les bailleurs sociaux sont très réceptifs à nos arguments techniques et financiers. Mais tous ne prennent pas forcément les devants en matière de technologies de construction innovantes ; certaines directions techniques sont encore assez conservatrices. Néanmoins les bailleurs sociaux ont une vision très qualitative de l’habitat : selon le ministère du logement, les bailleurs sociaux construisent d’ailleurs à des prix plus élevés que les promoteurs privés. Reste à espérer que cela se traduise bien par une qualité plus importante.
Vous avez récemment créé une filiale baptisée Maison Fanfan, dédiée à la construction de maisons individuelles passives. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Notre vocation est certes de répondre en premier lieu aux besoins des bailleurs sociaux, ou des grands promoteurs, en construisant aux standards HQE. Mais ce qui est réalisé pour des professionnels est déclinable pour des particuliers, sachant que nous avons un avantage commercial considérable en termes de prix, de transparence des prestations et de délais de construction : nous sommes moins chers, tout en visant des délais de construction raccourcis de moitié. Nos structures modulaires répondent aux attentes des particuliers en autorisant notamment des personnalisations : à l’instar de ce qui se passe dans l’industrie automobile, chacun peut choisir son aménagement propre, en termes de nombre ou de disposition des modules, et son niveau de finition.
Sur quelles innovations travaillez-vous pour l’avenir ?
Actuellement, nous travaillons sur la conception des panneaux de toit, pour ajouter la « dernière brique à notre édifice » et sur l’optimisation de l’intégration des fenêtres. Nous essayons aussi de maximiser le nombre d’éléments pouvant être intégré dans les murs, comme les convecteurs. Concernant les process de construction, nous nous employons désormais à travailler aussi bien sur structure bois, métallique ou sur poteau-poutre béton. Pour les ouvrages de grande hauteur, nous développons aussi des « façades-rideaux, » susceptibles d’être accrochés en devanture de structure en béton, et déjà considérés comme très efficaces au montage.
Vous avez fait une entrée remarquée en Afrique et en Irak. Pouvez-vous nous en dire davantage sur ces projets ?
En Irak, nous avons eu l’opportunité de travailler directement avec l’Œuvre d’Orient, un maître d’ouvrage confronté sur place à une situation de crise, dans un pays subissant des déplacements massifs de population. Dans ce contexte, il était nécessaire de construire rapidement des bâtiments fonctionnels (et même transportables dans certains cas) et de qualité, compte tenu de l’amplitude thermique propre à l’Irak.
L’Irak nous a également permis de mettre en pratique notre « philosophie industrielle » consistant à confier rapidement la fabrication et la construction à des intervenants locaux. Nous avons recruté et formé des personnes volontaires au sein des camps de réfugiés, qui ont pu très rapidement s’approprier nos process. De la sorte, nous avons peu mettre en œuvre notre conception sociale d’un logement de qualité, pouvant être bâti en situation d’urgence, et dont la construction est maîtrisée par des personnels locaux. Notre ambition est rigoureusement identique en Afrique où d’autres projets ont débuté.
L’Irak nous a également permis de mettre en pratique notre « philosophie industrielle » consistant à confier rapidement la fabrication et la construction à des intervenants locaux. Nous avons recruté et formé des personnes volontaires au sein des camps de réfugiés, qui ont pu très rapidement s’approprier nos process. De la sorte, nous avons peu mettre en œuvre notre conception sociale d’un logement de qualité, pouvant être bâti en situation d’urgence, et dont la construction est maîtrisée par des personnels locaux. Notre ambition est rigoureusement identique en Afrique où d’autres projets ont débuté.